Oeil ouvert et coeur battant

2023

Exposition personnelle

ANCIEN JOURNAL LIBÉRATION, PARIS

Partenaires: Wise Women Paris, Forest

Remerciements aux mécènes qui ont rendu possible cette exposition: Laurent Bandet, Production les Petits Français, Amandine Isnard, Olivia Chadefaux, Julien Masson, Mme & Mr Lopes, Mme & Mr Pimiskern, Raphaelle Toesca-David, Erell de Quelen, Christelle Joseph, Brigitte Eveno, William Mordos

A l’issue de mon exposition personnelle Au risque de se perdre présentée en Chine aux musées de la photographie de Pékin et de Xiamen en 2022, l’ensemble des œuvres photographiques ont été détruites. Acte certifié par la réception d’un lien we-transfer dans lequel un dossier cède un ensemble d’images prises au portable représentant les photographies jonchées au sol, lacérées, défigurées à coup de cutter et de marteau. Âpre réception, tant par le témoignage du geste accompli, que du sujet meurtri.  Au risque de se perdre fût une exposition entre document et fiction, retraçant le destin hors du commun d’une carmélite belge de la première moitié du XX ieme siècle.

Face à cet état des lieux, où la mémoire de la mémoire d’un destin retrouvé vint à être réduite à un simple dossier d’images inertes, disloquées sur l’écran d’ordinateur, je me suis intéressée au concept de ruine.

Selon Chateaubriand, « il y a deux sortes de ruines, l’une l’ouvrage du temps, l’autre l’ouvrage des hommes”. “les premières n’ont rien de désagréables (...) les secondes ruines sont plutôt des dévastations que des ruines; elles n’offrent que l’image du néant sans aucune puissance réparatrice » Dans ce contexte d’anéantissement à l’issue de cette exposition passée, l’œuvre persiste pourtant, au vu du caractère reproductible de ces photographies. Hors, dès lors, restreintes à un fichier numérique sauvegardées sur un disque dur. La poétique de la ruine semble en conséquence imaginaire.

L’exposition Oeil ouvert et Cœur battant cherche néanmoins à révoquer « cette image du néant » en restituant le cheminement de la traversée des œuvres. Dans un apparent chaos que seule la tempête déchaîne, deux phares lumineux comme repères éclairent ce voyage fictif révèlant des œuvres entre photographies-peintures-sculptures et collages dont trois photographies reproduites sous forme de reliques issues de l’exposition présentée en Asie: LIBERTY -  ML FLOW et TEMPEST.

Le mur est telle une jetée verticale, sur laquelle déferlent sensiblement des figures instables traversées par des forces insondables. Des images irrésolues, dissoutes dans une écume féconde perlent entre disparition et apparition.

L’exposition interroge plus universellement - après la ruine qu’en est-il ? A partir du «néant» quels « devenirs » ?      Pour reprendre plus justement la question du philosophe G.Deleuze et à compter de ce que l’on cherche à préserver, ou au contraire à oublier de nos histoires, de l’Histoire; « Quels devenirs nous traversent aujourd’hui ? »

Penser la ruine c’est interroger notre présent, ce « je ne sais quoi »* en chemin, en train de s’écrire, entre incertitude et projection. Posant invariablement la question de cette représentation à venir - avenir. En d’autres termes quelles sont les graines que l’on sème oeil ouvert et coeur battant ?

*Jankélévitch

fr

Following solo exhibition, Au risque de se perdre (At the Risk of Getting Lost) presented in China at the Beijing and Xiamen Photography Museums in 2022, all the photographic works were destroyed. This act was certified by the receipt of a we-transfer link in which a folder contains a collection of images taken on a cell phone, depicting photographs strewn on the ground, slashed and disfigured by box cutters and hammers. A bitter reception, both for the testimony of the act accomplished and for the bruised subject. Au risque de se perdre was an exhibition somewhere between document and fiction, retracing the extraordinary destiny of a Belgian Carmelite nun from the first half of the 20th century.

Faced with this state of affairs, where the memory of a rediscovered destiny was reduced to a simple folder of inert images, dislocated on the computer screen, I became interested in the concept of ruin.

According to Chateaubriand, "there are two kinds of ruins, one the work of time, the other the work of men." "The former have nothing unpleasant about them (...) the latter ruins are more devastations than ruins; they offer only the image of nothingness without any restorative power." In this context of annihilation at the end of this past exhibition, the work nevertheless persists, given the reproducible nature of these photographs. However, they are restricted to a digital file saved on a hard drive. The poetics of the ruin therefore seem imaginary.

The exhibition Oeil ouvert et Cœur battant (Open Eye and Beating Heart) nevertheless seeks to revoke "this image of nothingness" by reconstructing the journey through the works. In an apparent chaos unleashed only by the storm, two luminous beacons, like landmarks, illuminate this fictional journey, revealing works ranging from photographs to paintings to sculptures and collages, including three photographs reproduced as relics from the exhibition presented in Asia: LIBERTY - ML FLOW and TEMPEST.

The wall is like a vertical jetty, upon which unstable figures surging, traversed by unfathomable forces. Unresolved images, dissolved in a fertile foam, bubble between disappearance and appearance.

The exhibition raises a more universal question: after the ruin, what happens? From "nothingness," what "becomings"? To more aptly borrow the philosopher G. Deleuze's question, and based on what we seek to preserve, or, on the contrary, to forget from our stories, from History: "What becomings are we experiencing today?" »

Thinking about ruin means questioning our present, this "je ne sais quoi"* on the way, in the process of being written, between uncertainty and projection. Invariably posing the question of this future representation. In other words, what are the seeds we sow with open eyes and beating hearts?

*Jankélévitch

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